Les Murailles de Rome

Les murailles de Rome :

Les camps que les armées romaines établissaient à chaque étape pouvaient rappeler le souvenir de leurs ancêtres nomades de l'aube des temps lorsque ces derniers s'arrêtaient et s'enfermaient dans un enclos avant de repartir. Dès l'aube des temps, le Romain pensa à sa protection. La légende veut que Rome ait été dès l'origine une cité fortifiée. Le fait est vraisemblable si l'on admet que les Romains sont les descendants lointains des peuples préhistoriques, venus par les cols des Alpes.

Des fouilles récentes ont permis de mettre à jour des vestiges d'un mur entourant le Palatin fait d'argile et de bois, il a été daté des environs de 730 avant J.C. Mais ce qui est curieux c'est qu'il a été retrouvé au bas d'une colline alors qu'une construction militaire et stratégique l'aurait fait bâtir au sommet. On ne peut s'empêcher de faire un rapprochement entre la date de sa construction, telle qu'elle est donnée par l'archéologie, et la date de la fondation légendaire de Rome (753 avant J.C.) (idée développée par " le site de la stratégie et de l'histoire "). http://www.stratisc.org C'est peut-être le pomerium. Alors cette enceinte n'aurait qu'une valeur religieuse, on peut d'autant plus le penser que les Gaulois, lors de l'invasion de Rome, n'eurent aucune difficulté à envahir la Ville (390 avant J.C.), aucune barrière pour les arrêter, ils se heurtèrent seulement à des défenses élaborées au sommet du Capitole.

" …on prit le parti de faire monter dans la citadelle et au Capitole, outre les femmes et les enfants, la jeunesse en état de porter les armes et l'élite du sénat. " Tite Live, V, 39.

Mais ils durent trouver quelque chose puisque Tite Live parle de portes et de remparts, on peut supposer qu'une muraille de peu d'importance entourait alors la petite ville qu'était Rome à cette époque. C'est certainement celle qui vient d'être découverte.

" L'aile droite, placée loin du fleuve et presque au pied de la montagne, se retira vers Rome, et sans se donner le temps d'en fermer les portes se réfugia dans la citadelle. " Tite Live, V, 38.

" (Les Gaulois) …après avoir envoyé autour des remparts et vers les autres portes des éclaireurs qui devaient tâcher de découvrir quelle était dans cette situation désespérée l'intention des ennemis. " Tite Live, V, 39.

On n'admet plus aujourd'hui que les ruines actuelles du mur de Servius puissent remonter à l'époque royale, elles sont hors de proportions avec l'importance réelle de Rome vers la fin du VI ème siècle. Si l'enceinte servienne, du nom du sixième roi légendaire (Servius Tullius), avait existée lors de l'invasion gauloise, Rome n'aurait jamais été prise. On a trouvé à l'intérieure du rempart ou sous le rempart même des tombes postérieures au VI ème siècle or la loi défendait d'inhumer à l'intérieure de la Ville et les marques de carrière que portent de nombreux blocs ne sont pas d'un type archaïque. La muraille qui avait une hauteur de 5 à 6 mètres, serait seulement du IV ème siècle avant J.C. On sait en effet qu'après la catastrophe gauloise, les censeurs mirent en adjudication la construction d'un rempart de pierre. Ses murs étaient en tuf, venaient très certainement d'une carrière de Véies

En 211 avant J.C., quand Hannibal menaça Rome, une commission fut nommée pour restaurer les murs et les tours, Hannibal vint jusqu'à un temple d'Hercule, dont l'emplacement est aujourd'hui inconnu, sans doute à peu de distance de la porte Colline, angle Nord-est de l'enceinte. Son camp était près de l'Anio, on le vit, chevauchant à la tête de deux mille cavaliers, inspecter les murailles et les portes. Le proconsul Fulvius Flaccus, revenu de Campanie à marches forcées, était entré dans Rome par la porte Capène, entre le Caelius et l'Aventin, il avait traversé le quartier appelé Carinae et fixé son camp entre la porte Colline et la porte Esquiline. Il est à remarquer, d'ailleurs, que seul les portes avaient des tours, à la différence de la muraille aurélienne. Il était très irrité des provocations d'Hannibal et il ordonna à ses cavaliers de faire une sortie, une escarmouche s'engagea. Le terrain était semé de tombeaux et coupé de chemins creux, les cavaliers romains se trouvèrent fort gênés dans leurs mouvements, aussi les consuls envoyèrent-ils un renfort de cavaliers numides plus accoutumés à cette sorte de combat, ces cavaliers campaient sur l'Aventin, ils descendirent par le clivus Publicius et la foule qui, du Forum, vit de loin s'approcher cette troupe armée, croyant la ville prise, s'épouvanta, les magistrats eurent beaucoup de difficultés à lui faire comprendre ce qui se passait. Après quelques jours d'attente, Hannibal se retira sans avoir tenter un assaut.

Comme on peut le voir sur la carte ci-jointe, la muraille part du Tibre, entre le pont Sublicius et le pont Fabricius , près du théâtre de Marcellus (qui n'était pas construit à cette époque) pour aller à l'angle Sud-ouest du Capitole puis courir le long de cette colline entre elle et le Quirinal, après avoir traversé le Forum de Trajan, jusqu'à atteindre la vallée entre le Quirinal et le Pincio puis elle serpente à travers les hauteurs de l'Esquilin, traverse une autre vallée entre le mont Oppius et le Caelius où l'on pouvait trouver la porte Capène

" Sous le consulat de M. Valerius Maximus et de P. Decius Mus, 31 ans après le commencement de la guerre des Samnites, l'eau Appia fut amenée à Rome par le censeur Appius Claudius Crassus, depuis surnommé Cécus, qui fit aussi construire la voie Appienne depuis la porte Capène jusqu'à la ville de Capoue. " Frontin, des aqueducs de la ville de Rome, I, 5.

qui était le point de la via Appia suit des falaises au Sud-est et de là rejoint le Tibre au Sud du Forum Boarium après avoir longé le mont Aventin. Il faisait 11,5 kilomètres de long.

-- - > Carte de William Shepherd, 1923.

La muraille, dans son état actuelle, date d'époque probablement diverses ; on a cru reconnaître qu'en de nombreux endroits, du moins des ruines qui subsistent, les assises intérieures du mur sont composées de blocs taillés d'après le pied osque de 27 centimètres et non d'après le pied romain de 29 centimètres qui parait avoir supplanté le dudit pied osque dès le Vème siècle avant J.C. Les ruines visibles sur le Quirinal peuvent dater, selon Boni, de la construction du IVème siècle avant J.C. Les ruines qui peuvent être vues entre les deux cimes de l'Aventin (via di San Paolo) ne dateraient, selon certains archéologues, que de l'extrême fin de la République : en effet, la muraille est doublé d'un blocage et le curieux arc de tuf rouge qui le domine et qui marque, peut-être, l'emplacement d'une machine de guerre est en pierres liées par du mortier : là était la porta Randusculana , au fond d'un couloir étroit que le mur surplombait , elle devait son nom à ce qu'elle était anciennement garnie de plaques de bronze.

" Rodusculana porta : porte de Rome ainsi nommée parce qu'on l'avait laissé ébauchée et non polie ou bien parce qu'elle était attachée avec du cuivre appelé Raudus. " Festus, XVI.

Il faut noter que le mur dit de Servius ne coïncide pas absolument avec le pomeorium , c'est-à-dire avec la limite religieuse de la Ville. L'Aventin, la colline plébéienne par excellence, demeura en dehors du terrain sacré jusqu'au règne de Claude, les auspices qui valaient pour la Ville ne valaient pas pour l'Aventin. Etendre les limites du pomeorim n'était permis qu'aux chefs qui amplifiaient les frontières de l'Empire romain.

Au siècle d'Auguste, le mur Servien était devenu inutile. La paisible Rome du Haut Empire put se contenter longtemps d'une simple muraille d'octroi à la limite des 14 régions entre lesquelles Auguste avait réparti les quartiers urbains. L'empire était en paix, nulle menace ne pesait sur lui. Il fut réparé en 87 avant J.C. mais, donc, comme il n'avait plus aucune valeur militaire, les constructions d'habitations débordaient largement sur l'enceinte.

La muraille qui entoure Rome, encore de nos jours, est en grande partie celle de l'empereur Aurélien.

- -- > Gravure de G. Vasi, mur aurélien, 18ème siècle.

Pour défendre Rome qui, à part les prétoriens, n'avaient plus aucune troupe (les armées étant cantonnées sur les " limes "), l'empereur fit construire des remparts sur une longueur de 18 kilomètres. Les barbares avaient pénétré jusqu'au Fano, sur l'Adriatique, et l'empereur avait eu une grande peine à les battre et à les chasser de leurs positions. C'est pourquoi il fut jugé urgent de mette la ville à l'abri d'un coup de main.

" Alors Aurélien, se rendant compte que pourraient se reproduire des évènements semblables à ceux qu'avait connus le règne de Gallien, prit l'avis du Sénat pour étendre les murs de la ville de Rome " Histoire Auguste, le divin Aurélien, XXI, 9, trad. A. Chastagnol, bouquins, Laffont.

La muraille fut construite hâtivement et économiquement, il fut emprunté des matériaux à d'anciens monuments, on profita des constructions qui existaient dans le voisinage du tracé ; l'amphithéâtre Castrense, le camp prétoriens, la pyramide de Cestius, certaines parties d'aqueducs, biens d'autres édifices devinrent partie intégrante de la muraille, on a même retrouvé, lors d'une démolition, un mur avec des niches contenant encore des statues qu'on s'était contenté de murer. Aussi la ligne des murs est-elle fort capricieuse, généralement, elle suivait l'enceinte de l'octroi.

Les remparts furent construits en seulement 5 ans (271- 275 après J.C.), son initiateur ne les vit pas fini puisque l'empereur Aurélien mourut quelques mois avant qu'ils ne soient achevés. En fait, ils furent terminés par Probus. Cette enceinte était renforcée par 383 tours de 10,50 mètres de hauteur dépassant la hauteur du mur proprement dit de 4,50 mètres, elle était percée de 18 portes, la largeur de la muraille varie selon le terrain, elle est en moyenne de 4 mètres, elle fut relevée par Maxence, le rival de Constantin. A trois mètres du sol environ courait une galerie soutenue par des arcades, il y avait généralement six arcades entre chaque tour, elle-même renfermait des chambres dont la plus basse était de plein pied avec la galerie, des meurtrières, généralement au nombre de cinq, y était percées ainsi que des ouvertures ayant vue sur la muraille. Des travaux de restauration furent entrepris par Arcadius et Honorius en 403 après J.C., ils sont attestés par des inscriptions trouvées sur les portes Portuensis , Praenestina et Tiburtina , s'ils protégèrent Rome au temps de Bélisaire, ils n'empêchèrent ni les Goths d'Alaric ni les Vandales de Genséric de pénétrer dans la Ville et de la mettre à sac. Le mur d'Aurélien, sur la rive gauche, bordait le Tibre tout le long du Champ de Mars, depuis le pons Aurelius jusqu'à la hauteur du Pincio ; cette partie de l'enceinte, peu soignée, passait au temps de Bélisaire, pour très difficile à défendre. Au pons Aelius , il était relié au mausolée d'Hadrien qui formait une tête de pont et surveillait les Prati. Entre le Tibre et le Pincio, l'enceinte barrait l'étranglement, large de 400 mètres, qui séparait le Champ de Mars de la plaine comprise entre le Tibre et le pied des monts Parioli. Au Pincio, Aurélien a utilisé les substructures des horii Aciliorum (ces jardins avaient appartenu, au I er siècle, aux Acilii Glabriones ; au IV ème siècle, il se trouve qu'ils n'avaient pas été accaparés par les empereurs). De la porta Salaria à la porta Pinciana s'étendait la partie la plus vulnérable du mur. C'est par la porta Salaria qu'Alaric entra dans Rome en 410 après J.C., Bélisaire avait fixé son quartier général à la domus Pinciana , près de la porte du même nom. La partie orientale de l'enceinte dominait la dépression que parcourt un affluent de l'Anio. De la porta Praenestina à la porta Tiburtina , Aurélien a utilisé comme contreforts les arches du triple aqueduc de l'aqua Marcia , l' aqua Julia et l' aqua Tepula dont l'ensemble date de la restauration d'Agrippa en 33 avant J.C. Au-delà, l'enceinte utilise la ligne du double aqueduc de l' aqua Claudia et de l' Anio Novus dont les arches ne servent pas seulement de contreforts mais forment une partie de la muraille, puis à travers les anciens horti Spei veteris , elle rejoint l 'amphitheatrum castrense . Ensuite, le mur suit le bord méridional du Caelius. La partie la plus méridionale de l'enceinte dominait la vallée assez profonde où coulait l 'Almo , elle laissait, en dehors, un grand nombre d'édifices anciens comme le vieux temple de Mars du Campus minor , on peut remarquer, dans le rempart, la structure d'un aqueduc de nom inconnu. Sur la rive droite du Tibre, l'enceinte formait un angle assez aigu vers le Janicule.

  ---> Porte S. Sébastiano, carte de G. Maggi, 1625.

Il s'agissait surtout de rendre le Janicule intenable pour un ennemi, la porta Aurélia, que l'on voit sur le plan, a été détruite en 1643. Cette muraille fut, par la suite, améliorée par Maxence puis par Constantin.

Voir : " Les Monuments antiques de Rome encore existants " de E. Rodocanachi, Hachette, 1920.

            

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