Comices Centuriates

Comices centuriates: (comicia centuriata)

C'était la réunion du peuple en armes telle que la voulut le roi légendaire Servius Tullius.

"… la postérité attribue à Servius la gloire d'avoir introduit dans l'état l'ordre qui distingue les rangs, les fortunes et les dignités, en établissant le cens, la plus salutaire des institutions, pour un peuple destiné à tant de grandeur. Ce règlement imposait à chacun l'obligation de subvenir aux besoins de l'état, soit en paix, soit en guerre, non par des taxes individuelles et communes comme auparavant, mais dans la proportion de son revenu. Servius forma ensuite les diverses classes des citoyens et les centuries, ainsi que cet ordre, fondé sur le cens lui-même, aussi admirable pendant la paix que pendant la guerre. " Tite Live, I, 42.

Puisqu'elle représentait des hommes armés, elle devait se dérouler hors du pomerium, elle se passait au Champ de Mars. (Aulu Gelle, XV, 27)

Le peuple fut, alors, découpé en classes, elles mêmes divisées en centuries. Ces comices furent ainsi une organisation fiscale et militaire du pays. Ce fut la plus importante des assemblées politiques. Elle fut toujours composée de 5 classes réparties en 193 centuries, chacune d'entre elles représentait une voix.

" La première classe était composée de ceux qui possédaient un cens de cent mille as et au-delà; elle était partagée en quatre-vingts centuries, quarante de jeunes gens et quarante d'hommes plus mûrs. Ceux-ci étaient chargés de garder la ville, ceux-là de faire la guerre au dehors. On leur donna pour armes défensives, le casque, le bouclier, les jambières et la cuirasse, le tout en bronze; et pour armes offensives, la lance et l'épée. À cette première classe, Servius adjoignit deux centuries d'ouvriers, qui servaient sans porter d'armes, et devaient préparer les machines de guerre. La seconde classe comprenait ceux dont le cens était au-dessous de cent mille as, jusqu'à soixante-quinze mille, et se composait de vingt centuries de citoyens, jeunes et vieux. Leurs armes étaient les mêmes que celles de la première classe, si ce n'est que le bouclier était plus long et qu'ils n'avaient pas de cuirasse. Le cens exigé pour la troisième classe était de cinquante mille as : le nombre des centuries, la division des âges, l'équipement de guerre, sauf les jambières, que Servius supprima, tout était le même que pour la seconde classe. Le cens de la quatrième classe était de vingt-cinq mille as, et le nombre des centuries égal à celui de la précédente; mais les armes différaient. La quatrième classe n'avait que la lance et le dard. La cinquième classe, plus nombreuse, se composait de trente centuries : elle était armée de frondes et de pierres, et comprenait aussi les cors et les trompettes, répartis en deux centuries. Le cens de cette classe était de onze mille as. Le reste du menu peuple, dont le cens n'allait pas jusque-là, fut réuni en une seule centurie, exempte du service militaire. Après avoir ainsi composé et équipé son infanterie, il leva, parmi les premiers de la ville, douze centuries de cavaliers; et des trois que Romulus avait organisées, il en forma six, en leur laissant les noms qu'elles avaient reçus au moment de leur institution. Le trésor public fournit dix mille as pour achat de chevaux, dont l'entretien fut assuré par une taxe annuelle de deux mille as, payée par les veuves. Ainsi retombaient sur le riche toutes les charges, dont le pauvre était soulagé mais le riche trouva des dédommagements dans les privilèges honorifiques que lui conféra Tullius; car si, jusque-là, suivant l'exemple de Romulus et la tradition des rois ses successeurs, les suffrages avaient été recueillis par tête, sans distinction de valeur ni d'autorité, de quelque citoyen qu'ils vinssent, un nouveau système de gradation dans la manière d'aller aux voix concentra toute la puissance aux mains des premières classes, sans paraître toutefois exclure qui que ce fût du droit de suffrage. On appelait d'abord les chevaliers, puis les quatre-vingts centuries de la première classe. S'ils ne s'accordaient pas, ce qui arrivait rarement, ou prenait les voix de la seconde classe; mais on ne fut presque jamais obligé de descendre jusqu'à la dernière. " Tite Live, I, 43.

En résumé des propos de Tite Live, voici le découpage du peuple suivant sa fortune :

Chevaliers  > 18 centuries

1ère classe > 80 centuries (100 000 as)

2ème classe > 20 centuries (75 000 as)

3ème classe > 20 centuries (50 000 as)

4ème classe > 20 centuries (25 000 as)

5ème classe > 30 centuries (11 000 as)

Denys d'Halicarnasse nous donne une sixième classe dans laquelle, il range les plus pauvres (capite sensi = ceux qui n'ont que leur tête pour capital).

Leur réunion se faisait sur convocation d'un magistrat cum imperium qui prenait d'abord les auspices. Elle se faisait au son du clairon (classicum) et au sommet du Capitole montait un drapeau rouge (signum). Dans les temps anciens, il y avait, sur le Janicule, une troupe d'hommes armés qui protégeait les participants contre toute intrusion des peuplades hostiles des alentours.

Le vote, comme tous les votes qui s'exprimaient dans les différents comices, s'arrêtait dès que la majorité était atteinte. Comme un rapide calcul peut le montrer, elle était de 97 voix.

--- > Ancienne monnaie de la gens Licinia représentant le vote par tablette.

Elle pouvait être atteinte par le vote par le vote des centuries de chevaliers, au nombre de 18, plus celles de la 1ère classe, elle, au nombre de 80. Mommsen estima que plus de la moitié des fermiers la composaient. Ce vote était, donc, profitables aux plus aisés, il y avait adéquation entre ceux qui risquaient leur vie à la guerre et qui étaient plus favorisés lors des élections en votant parmi les premiers et ceux qui ne partaient pas mais qui s'exprimaient dans la dernière classe, les capite censi. C'est ainsi que certaines personnes, qui en avaient le droit, ne votèrent jamais. Ce vote fut remanié aux alentour de la seconde guerre punique, il semblerait, suivant un texte de Cicéron que l'on a retrouvé, surchargé, raturé, en un mot difficilement exploitable, que la première classe passa de 80 centuries à seulement 70 ce qui permit le vote de la seconde classe. Ce même texte fait allusion à la centurie prérogative. Mais en fait, qui était elle ? C'était la centurie qui votait en premier, le résultat de ses choix avait une valeur religieuse de présage, et souvent son vote fut suivi par les autres électeurs. A l'origine, elle était issue de la classe des chevaliers puis on trouva, dans les textes anciens, sa place dans la première classe, il s'agissait d'une centurie de juniores, " La tribu Galéria, section des jeunes qui, à la suite du tirage au sort, était la première à voter, avait désigné comme consuls Quintus Fulvius Flaccus et Quintus Fabius Maximus et les tribus appelées à voter dans l'ordre normal auraient exprimé le même suffrage, sans le veto des tribuns Gaius et Lucius Arrénius qui prétendaient qu'il n'était pas conforme à la constitution de maintenir un magistrat dans son poste et qu'on donnait un exemple bien plus fâcheux encore en élisant celui qui présidait les comices " Tite Live, XXVII, 6.trad. A. Flobert.

Car les centuries étaient elles mêmes divisées en juniores (18-46 ans) et en seniores (après 46 ans) qui formaient la réserve de l'armée. En 54 avant J.C., pour l'élection au consulat, deux candidats voulaient débourser dix millions de sesterces pour contrôler le vote de la prérogative (Cic. Ad Q. Fr. 2, 14, 4).

Quels étaient leurs rôles ?

Ils devaient procéder à l'élection des magistrats supérieurs, consuls et préteurs, qui allaient devenir leurs chefs dans l'armée ; dans les premiers temps, ils décidaient de la paix ou de la guerre, sur propositions du sénat ; c'était devant eux que les condamnés à mort adressaient leur appel de la sentence qui les frappaient. De nombreuses lois sont passées devant eux (par exemple : retour de Cicéron d'exil). Leur nombre ainsi que leurs attributions juridiques diminua beaucoup à partir du deuxième siècle avant J.C., toutefois, ils gardèrent leur compétence pour juger les procès de parricidum et de perduellio (haute trahison).

Sous l'Empire, ils vont continuer de s'assembler jusqu'au troisième siècle après J.C. Ils ont complètement perdu toute compétence judiciaire et vont perdre tout pouvoir législatif (ils voteront encore une loi agraire sous Nerva). Ils vont continuer d'élire des magistrats qui seront présentés par l'Empereur (commendatio).

Bibliographie :

- Rome, de la Cité-Etat à l'Empire " d'Elizabeth Deniaux. Hachette, carré-histoire.

- Rome, démocratie impossible ? " de Norbert Rouland. Actes sud, Babel.

- Mentalités et institutions politiques romaines " d'Eugen Cizek Fayard.

- Le métier de citoyen dans la Rome républicaine " de Claude Nicolet. Gallimard.

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