Champ de mars
Champ de Mars :
---> Vue du Champ de Mars avec le Cirque construit par Domitien. Maquette de A. Caron.
C’est une vaste plaine marécageuse au Nord de l’Urbs, comprise entre le Capitole, le Tibre et le Quirinal. En fait ces limites n’ont pas été définies par la nature mais par les hommes (idée développée dans « Rome, ville et capital » de Yves Perrin). Sa superficie est grande : environ 250 hectares, il s’étend sur un peu plus de 2 kilomètres du Nord au Sud, du Capitole à la porte Flamina et sur un peu moins de 2 kilomètres entre le Quirinal et le fleuve qui provoqua de nombreuses inondations d’où la présence de marécages en plus des ruisseaux.
Selon une tradition, c’était une propriété des Tarquins et c’est seulement à leur expulsion que le Champ de Mars devint une terre appartenant à l’Etat. La dernière récolte moissonnée par les Romains fut jetée au Tibre et la légende raconte qu’elle donna naissance à une île (île tibérine).
« Quant aux biens du roi, dont la restitution avait été d'abord décrétée, la chose fut remise en délibération dans le sénat, qui, cédant à son ressentiment, refusa de les rendre, et refusa même de les réunir au domaine public. On en abandonna le pillage au peuple, afin qu'ayant une fois porté la main sur les dépouilles royales, il perdît pour toujours l'espoir de faire la paix avec les rois. Les champs des Tarquins, situés entre la ville et le Tibre, furent consacrés au dieu Mars, et ce fut depuis le Champ de Mars. Il s'y trouvait alors du blé prêt à être moissonné, et comme on se faisait un scrupule religieux de consommer la récolte de ce champ, on envoya une grande quantité de citoyens, qui coupèrent les épis avec la paille, et les ayant déposés dans des corbeilles, les jetèrent tout à la fois dans le Tibre, dont les eaux étaient basses, comme elles le sont toujours dans les grandes chaleurs. On prétend que ce blé s'arrêta par monceaux sur les bas-fonds du fleuve, en se couvrant de limon; et que peu à peu, tout ce que le Tibre emportait dans son cours s'étant accumulé sur ce point, il s'y forma enfin une île. J'imagine que dans la suite on y rapporta des terres, et que la main des hommes contribua à rendre ce terrain assez élevé et assez solide pour porter des temples et des portiques. » Tite Live, II, 5.
Dans les temps anciens, il servait de pâturages aux moutons et aux chevaux, il était aussi cultivé et donnait du blé. Puis il servit aux entraînements athlétiques de la jeunesse, à des réunions à caractères militaires, aux recensements, étant totalement en dehors du « pomœrium », il n’y fut inclus que lors de la construction du mur aurélien. Sa vocation militaire est évoquée par la présence de l’autel de Mars et du temple de Bellone (déesse romaine de la guerre)
« Quintus Fulvius Gillo, lieutenant de Scipion, amena les Carthaginois à Rome; on leur défendit d'entrer dans la ville et on leur assigna un logement dans une villa de l'état; le sénat leur donna audience dans le temple de Bellone. » Tite Live, XXX, 21.
L’autel de Mars a du être construit durant la période royale, les censeurs avaient coutume de s’y asseoir, sur leurs chaises curules, après les élections.
« Après l’élection, selon l’antique coutume, les censeurs s’assirent sur la chaise curule au Champ de Mars devant l’autel du dieu » Tite Live, XL, 45.
Là avaient lieu les réunions du peuple en armes et les comices centuriates. Les électeurs y étaient appelés à voter, le signal était donné par un drapeau rouge agité du sommet du Capitole, d’où la création par César des « saepta ». Les ambassadeurs qui ne pouvaient rentrer dans la Ville y étaient reçus. « Les Macédoniens furent hébergés en dehors de la ville dans la maison de l’Etat : on leur fournit le logement avec toutes les commodités et on leur accorda une audience au temple de Bellone » Tite Live, XXXIII, 24.
Les cultes étrangers y élirent domicile.
---> Maquette de A. Caron
Entre 231 avant J.C. et le début de l’époque augustéenne, 15 temples s’y élevèrent et plus durant le siècle suivant. Le principal édifice en était le Cirque Flaminius, construit en 221 avant J.C.
C’est Sylla qui commença à vendre à des particuliers ce domaine public, ayant besoin d’argent pour mener à bien sa guerre contre Mithridates. Au Nord, on vit s’élever des immeubles à usage d’habitation (insulae), Scipion Emilien y avait déjà implanté des jardins. En raison de sa grande superficie, il fit l’objet de différents aménagements à partir du IIème siècle avant J.C. Chaque homme politique voulut laisser son empreinte en construisant un monument (exemple de Pompée qui battit là son théâtre). Mais c’est à l’époque d’Auguste qu’il connut son plus grand développement architectural, Agrippa (son gendre) édifia un tel nombre de monuments, durant son édilité, que le Champ de Mars devint le lieu le plus remarquable et le plus magnifique de Rome. (Strabon, V, 3, 8). Plus tard, Hadrien et les Antonins parachevèrent ce qu’avaient fait leurs prédécesseurs. Lors des grandes invasions, la diminution de la population romaine fit que les collines environnantes furent petit à petit abandonnées au profit du Champ de Mars.