Bataille d'Actium : 2 septembre 31 avant J.C.
Cette bataille se déroula au sud de Corfou, au nord-ouest de la Grèce , aux abords du golfe ambracique. Elle mit aux prises les deux triumvirs qui restaient en lice pour le pouvoir suprême : Octave qui va devenir Auguste et Marc Antoine. En écoutant les historiens, on va dire comme eux qu'elle vit s'affronter à peu près 370.000 hommes.
--- Image prise sur le site : History of Western Civilization
Elle mettait fin à 18 ans de guerre civile qui avait commencé lorsque Jules César avait franchi le Rubicon. Elle marquait aussi la fin d'un régime (République) pour entrer dans une période intermédiaire qui allait déboucher sur l'Empire qui n'osait pas dire encore son nom. Elle vit s'affronter deux Romains, partisan de Jules César, chacun d'eux voulant être son unique héritier politique. Le gain de cette bataille détermina qui devait régner seul sur le monde romain. Dans cet affrontement, le sénat, qui était aux mains d'Octave, ne déclara la guerre qu'à l'Egypte. Ce combat entre l'Orient et l'Occident ne devint décisif pour les deux hommes qu'après qu'il eut lieu ; ce ne devait être, aux yeux d'Antoine, qu'une rencontre de peu d'importance destinée à briser un blocus et à permettre à son armée terrestre, sous le commandement de Canidius Crassus , de gagner l'Orient. Elle souffrait de la malaria et se trouvait couper de son ravitaillement en blé égyptien, la Grèce ne pouvant nourrir cette multitude. A l'appui de cette thèse, on retrouve une étude faite par M. Tarn, dans les années 1930, qui nous dit qu' Actium ne fut pas une grande bataille décisive mais à peine un engagement entre deux armées. D'ailleurs, aux yeux de la propagande d'Octave, elle ne fut une grande victoire qu'après qu'un certain temps se fut écoulé. Cette bataille faillit être terrestre ; les forces en présence étaient l'une au nord de la baie d'Ambracie (Octave) et les autres (Antoine) étaient sur la pointe méridional comme le montre le plan ci-dessus.
Plutarque raconte que Cléopâtre persuada Antoine qu'il avait besoin d'une victoire navale malgré sa supériorité flagrante sur terre :
« Mais il s'était rendu si dépendant d'une femme, qu'avec une telle supériorité de forces de terre, il préféra de combattre sur mer, par le seul motif de plaire à Cléopâtre… » Plutarque, Antoine, LXVIII.
Cette main-mise permanente de Cléopâtre sur son esprit provoqua de nombreuses défections dans son camp et malheureusement des gens le trahirent, passèrent chez Octave avec des renseignements importants, notamment Dellius qui dévoila les plans de bataille à Agrippa (commandant des troupes navales d'Octave). On doit de bien connaître cet affrontement à deux historiens : Plutarque et Dion Cassius.
Avant la bataille proprement dite, on vit de dérouler une escarmouche navale entre Sosius , lieutenant d'Antoine qui voulut profiter de l'absence d'Agrippa pour esseyer de vaincre les forces ennemis, ce qu'il réussit presque mais ce dernier revint et tout bascula en sa faveur. Puis le combat proprement dit s'engagea mais seulement après quatre jours de tempête, pendant ce temps les troupes à pieds étaient rangées en bataille, immobiles, dans l'attente d'un engagement qui ne vint pas. Pour cette rencontre, le navire amiral d'Octave était à six rangs de rames, sa flotte était composée de navires et d'équipages qui avaient luttés contre Sextus Pompée et de vaisseaux de celui-ci, capturée après sa défaite ; quant à celui que montait Antoine, il avait dix rangs de rameurs.
--- Gravure du XVII ème siècle.
Les forces en présence étaient, pour Octave, d'environ 350 navires, plus légers que ceux de son adversaire contre, suivant les auteurs, 300 ou 170 vaisseaux lourds pour Antoine, les plus gros étaient à dix rangs de rames et aux dires de l'historien Orose (né vers 380), ils ne dominaient la mer que d'un peu plus de 3 mètres !!!??? Ses armées tant navales que terrestres, en plus des effectifs purement romains, étaient formées de contingents envoyés par des princes orientaux qui n'avaient pas la même valeur guerrière qu'un légionnaire.
« Lorsqu'on fut près de commencer la guerre, Antoine n'avait pas moins de cinq cents vaisseaux, parmi lesquels plusieurs étaient à huit et à dix rangs de rames, tous aussi magnifiquement armés que s'ils n'eussent dû servir qu'à la pompe d'un triomphe. Son armée était de deux cent mille hommes de pied et de douze mille chevaux. Il avait sous ses ordres plusieurs rois ses alliés; Bocchus qui régnait en Afrique; Tarcondémus, dans la Cilicie supérieure; Archélaiis, dans la Cappadoce ; Philadelphe, roi de Paphlagonie; Mithridate, de la Comagène , et Adallas, de Thrace. Plusieurs autres princes, qui n'avaient pu s'y trouver en personne, lui avaient envoyé leurs troupes, tels que Polémon, roi de Pont; Manchus, roi des Arabes; Hérode, des Juifs; Amyntas, des Lycaoniens et des Galates : le roi des Mèdes lui-même lui avait envoyé un renfort considérable. » Plutarque, vie d'Antoine, LXVII.
Il ne faut pas oublier dans cette addition les 60 navires de Cléopâtre. Les vaisseaux d'Octave avaient été en quelque sorte blindés et plus légers que leurs adversaires virevoltaient autour d'eux, les attaquant à l'éperon, plusieurs fois s'il le fallait, et détruisant leurs rames pour les empêcher de manœuvrer.
Tout se déroula aux ailes, droite pour Antoine qui devient la gauche pour Agrippa. Ce dernier fit semblant de battre en retraite, il entraîna une partie de la flotte ennemie et détruisit ainsi la stratégie qu'Antoine avait mise en place. Le combat était à peine engagé lorsque une partie des navires d'Antoine rompirent le combat, leur général en chef venait les abandonner pour suivre Cléopâtre qui se retirait de l'engagement avec sa soixantaine de navires. D'après M. Kromayer (qui publia une relation de la bataille en 1899), on ne peut parler de trahison de la reine égyptienne mais d'une fuite préméditée en accord avec son amant à qui il ne restait que la solution d'une retraite. Le lendemain de la bataille vit la capitulation des navires d'Antoine restés à Actium. Pour Plutarque, ce combat fit 5.000 victimes tandis qu'Orose parle de 12.000 plus 1.000 autres qui décédèrent des suites de leurs blessures.
Quelques jours plus tard, devant l'absence de ses chefs, l'armée de terre se rallia à Octave. Pourtant Antoine lui avait donné l'ordre de regagner l'Asie en passant par la Macédoine. Vaincu , il se retira à Paretorim , proche d'Alexandrie.
Après Actium , Apollon devint le protecteur personnel d'Octave car à ce promontoire ( Actium était un promontoire), il y avait un temple en ruines d'Apollon Actiaque qu'il fit relevé.
« Auguste avance à son tour, et ses armes ont achevé la défaite. Rome triomphe sous les auspices d'Apollon ; la reine du Nil est punie ; les flots ioniens se jouent de son sceptre brisé…Mais sa défaite a mérité des temples et le surnom d'Actius à Apollon, qui d'une seule de ses flèches avait submergé dix navires. » Properce, Elégie IV, 6.
Il institua les jeux actiens qui devaient se célébrer tous les 4 ans. Lui qui, jusqu'alors, avait été un être impitoyable, fut soudainement indulgent pour les vaincus, seul un fils de Curion fut exécuté. Virgile a évoqué Actium dans sa description du bouclier d'Enée.
« L' Apollon d'Actium , voyant cela d'en haut, tendait son arc; épouvantés, tous tournaient le dos, tous, l'Égypte, et les Indiens, l'Arabie entière et les Sabéens .
La reine elle-même, après avoir invoqué les vents, semblait mettre à la voile, et déjà détacher et lâcher peu à peu les cordages.
Au milieu des massacres, le maître du feu l'avait représentée pâlissant devant sa mort future…» Enéïde VIII, vers 700 et suivants.