Spartacus :
Célèbre pour la révolte d'esclaves qu'il a menée. Elle mit en péril un monde fondé sur l'esclavagisme ; elle commença en 73 avant J.C. et finit en 71 avant J.C. On l'appelle aussi la 3 ème guerre servile.
--- Identique à sa nationalité, Spartacus était un type de gladiateur Thrace, comme on peut le voir sur cette figurine. Il était armé d'un long poignard courbe ( sica supina ) et était protégé par un petit bouclier carré, par des jambières montant jusqu'aux cuisses. Il combattait un mirmillon, un hoplomaque ou un autre Thrace.
On ne connaît pas son véritable nom, mais il est certainement d'origine thrace et a été romanisé. Des rois de cette contrée s'étaient appelés Spartakos . D'après l'historien Florus , il aurait appartenu à une tribu ralliée à Rome. Il aurait même été soldat dans les troupes auxiliaires des légions romaines, il aurait déserté et serait devenu brigand. Arrêté, il avait été condamné à la damnatio ad gladium. Mais Varron, dans une œuvre perdue, comme Plutarque ou Appien ont une version différente, il aurait été prisonnier de guerre et jamais ne se serait livrer au brigandage. C'est par Plutarque que nous connaissons le nom de son propriétaire, le laniste Lentulus Batiatus (laniste = fournisseur et entraîneurs de gladiateurs). Devant un horizon austère et même mortel, il s'évada avec d'autres esclaves promis comme lui à la gladiature. Ils s'enfuirent sans armes, ils durent s'emparer de broches chez un rôtisseur voisin pour avoir un semblant de défense. Heureusement pour eux, ils vont rencontrer un convoi transportant des armes pour un futur combat dans l'arène. Ils s'en emparent. Puis, ils se dirigèrent vers le Vésuve. En allant vers ce volcan, ils affrontèrent avec succès des milices urbaines dont ils prirent les armes car c'était un de leur principal souci : la possession d'armes. Une fois arrivés à leur but, ils se choisirent des chefs : Spartacus en premier, les historiens romains hostiles à ce dernier ne peuvent s'empêcher de vanter ses diverses qualités, puis Oenomaüs et Crixus qui seront ses lieutenants. Des centaines et même des milliers d'esclaves les rejoignent alors.
Pour assurer le maintien de l'ordre, mater une révolte servile, nul général de renom ne voulut être désigné par le Sénat :
« car les Romains ne pensaient pas encore que c'était une guerre dans toutes les formes. Ils croyaient que c'était quelque chose comme une attaque isolée, semblable à un acte de brigandage. » Appien, Spartacus, 116.
Celui-ci va désigner le préteur en charge, un certain Claudius Pulcher. Les historiens antiques ne sont pas d'accord sur son nom. Il est à la tête de 3.000 hommes et va cerner Spartacus sur les pentes du Vésuve. Ce dernier, avec ses compagnons, grâce à des sarments de vigne taillés en échelles va descendre de la montagne par des à-pics et prendre les Romains à revers. Après ce combat, le Thrace et ses compagnons vont rayonner dans toute la Campanie, ils vont même jusqu'à attaquer des villes. Il semblerait qu'il ait été rejoint par des hommes libres de basse extraction.
Pour exterminer des esclaves révoltés qui menaçaient la villa de Nola, le Sénat envoya, alors, deux préteurs : Varinius Glaber et Publius Valerius à la tête d'une troupe nombreuse. Et c'est à ce moment que la dissension se mit dans le camp des révoltés. Oenomaüs se sépara de Spartacus et partit avec 30.000 hommes, suivant Salluste, il sera bientôt défait et tué par les soldats romains. Ils sont pour le moment dans la région d'Italie qui correspont grosso modo au talon de la « botte ». Ils se battent contre un lieutenant de Varinius : Cossinius qui est vaincu et tué. Cette victoire a un immense retentissement dans cette région et va aider au développement en nombre de l'armée des esclaves. Là, se trouvait de grandes propriétés (latifundia) qui s'étaient développés au détriment des petites et c'est ainsi que le petit paysan pauvre va grossir l'armée de Spartacus.
D'autres vont encore rejoindre ses rangs lorsqu'il va triompher de Varinius qui est à la tête de 4 cohortes soit environ 2.000 homme. D'après Appien, les révoltés vont se retrouver au nombre de 70.000 tandis qu'un autre historien latin, Orose, ne parle que de 40.000.
Spartacus va vouloir imiter ses anciens maîtres jusque dans les détails du pouvoir, il se fera précéder par des licteurs portant les faisceaux pris sur les dépouilles des vaincus, il accroît ainsi son prestige auprès de ses troupes.
La discorde va se mettre entre les deux groupes principaux, les Thraces avec Spartacus à leur tête veulent quitter l'Italie tandis que les Gaulois soutenus par les Germains, avec Crixus comme chef, veulent rester et vivre de pillage. Les deux hommes vont se séparer. Le Gaulois va bientôt se retrouver face à une armée romaine commandée par un des consuls de l'année 72 avant J.C., Gellius . Pour la petite histoire, on constate que Caton le Jeune était dans cette armée, qu'il avait 23 ans et n'était pas encore connu ; il se conduira d'une magnifique manière et refusera toutes les distinctions que le consul voulait lui donner (dixit Plutarque). La rencontre (en Apulie) commença par une défaite des Romains mais Crixus va alors commettre la faute de ne pas les poursuivre. Sous la conduite du second du consul, le préteur Quintus Arrius, les légionnaires vont contre attaquer. Le Gaulois sera tué ainsi que 20.000 ou 30.000 hommes, suivant les sources. (Tite Live, Periochae XCVI)
Spartacus veut traverser l'Italie et aller vers le Nord mais le second consul, Lentulus , lui barre le passage en Ombrie. Il ne va pas engager l'ancien gladiateur tout de suite, il attend son collègue qui vient de battre Crixus. Puis, croyant Gellius tout proche, il va sortir des retranchements de son camp. Le Thrace engage le combat, le bat, fait volte face et attaque l'autre consul qu'il culbute facilement. Parmi les prisonniers faits, il va en prendre 300 qu'il fait combattre à mort comme des gladiateurs, il le fait pour honorer Crixus er ses hommes tombés au cours du combat. Puis, il va continuer vers le Nord où il est obligé d'affronter Caius Cassius Longimus, proconsul de la Gaule Cisalpine qu'il défait. Nul ne comprend pourquoi, soudain, il fait demi tour, on en est réduit à penser qu'il veut marcher sur Rome. La panique et l'épouvante s'empare de la ville, les consuls sont à nouveau vaincus, devant cet échec, le Sénat, mesure exceptionnelle, les destitue. Alors que personne ne veut affronter des esclaves voici venir sur le devant de la scène Crassus qui ainsi va se positionner en sauveur. Il disposait de six légions soit environ 30.000 hommes, selon Appien.
« Il marcha contre Spartacus, à la tête de six nouvelles légions. À son arrivée au camp de ses prédécesseurs, les deux légions qui avaient combattu, la campagne précédente, sous les deux consuls, passèrent sous ses ordres. »
Son arrivée au milieu des combats commença mal. Un de ses légats, Mumius , à qui il avait confié deux légions, avec l'ordre de trouver Spartacus sans engager de bataille, désobéit par ambition, il espérait se couvrir de gloire mais ce fut un très grave échec, il connut le goût amer de la défaite. Ses hommes, en rentrant dans le camp romain vont être décimés pour faire un exemple. Crassus fit appel à une ancienne coutume tombée en désuétude qui était d'exécuter un homme sur dix (décimation), d'autres historiens parlent de cet évènement comme s'étant déroulé dès l'arrivée de Crassus :
« À son arrivée au camp de ses prédécesseurs, les deux légions qui avaient combattu, la campagne précédente, sous les deux consuls, passèrent sous ses ordres. Pour les punir de s'être si souvent laissé vaincre, il les fit décimer. D'autres disent, qu'ayant livré une première bataille avec toutes ses forces et ayant été battu lui aussi, il fit décimer son armée entière, et fit égorger environ quatre mille de ses soldats, sans aucun égard au nombre. » Appien, guerre civile de Spartacus, 118.
Puis, il va disposer ses troupes aux débouchés des routes de l'Apennin et de la vallée du Tibre ainsi, il protégeait Rome.
Alors, le Thrace prend le chemin de la Lucanie pour aller jusqu'à la mer. Il veut prendre pied en Sicile, c'est Verrès qui est gouverneur de cette île et son incapacité militaire fait qu'aucune force navale ne la défend.
Il est curieux de constater seul Plutarque parle des pirates pour réaliser cette entreprise :
«En jetant dans l'île deux mille hommes, il y aurait ranimé la guerre des esclaves : éteinte depuis peu, il ne fallait qu'une faible étincelle pour l'allumer de nouveau. Les Ciliciens lui donnèrent leur parole, et reçurent ses présents ; mais ils le trompèrent, et remirent à la voile. » Plutarque, Crassus.
Spartacus trahit par les pirates va se réfugier dans la presqu'île de Rhegium (pointe de la botte italienne), Crassus fait, alors, creuser par ses légionnaires un grand fossé (15 lieues de long) d'une mer à l'autre de l'isthme :
…il (Crassus) entreprend de fermer l'isthme par un retranchement ; c'était un moyen de préserver ses soldats de l'oisiveté, et d'ôter à l'ennemi les moyens de se procurer des vivres. C'était un grand et difficile ouvrage : il l'acheva pourtant et l'exécuta entièrement, contre toute attente, en peu de temps. Une tranchée fut tirée d'une mer à l'autre, au travers de l'isthme, sur une longueur de trois cents stades, une largeur et une profondeur de quinze pieds. Au-dessus de ce fossé s'élevait un mur d'une hauteur et d'une force prodigieuses. Plutarque, vie de Crassus.
Il croit, ainsi, isoler le gladiateur et ses troupes. Mais, il va le franchir ; d'après les historiens antiques, à ce moment, Spartacus aurait disposer de 100.000 hommes et dans le même temps, Crassus aurait eu sous ses ordres 10 légions soit environ 50.000 sans compter les auxiliaires. Maintenant, le Thrace ne sait plus où aller, en désespoir de cause, il se dirige vers le golfe de Tarente. Crassus ne cesse de le harceler de peur que Pompée revenant victorieux d'Espagne contre Sertorius ne lui vole le premier rôle ;
« Crassus avait écrit au Sénat qu'il faudrait rappeler de Thrace Lucullus, et d'Espagne Pompée ; mais il s'en repentit, et il se hâta de terminer la guerre avant qu'ils arrivassent, sentant bien que c'est à celui qui serait venu à son secours, et non point à lui-même que l'on attribuerait le succès. » Plutarque, vie de Crassus.
--- Mirmillon et Thrace (à droite)
Un des lieutenants du Romain, Scrofa , chargé de suivre l'armée des esclaves est imprudent. Le Thrace se retourne brusquement contre lui et le bat.
Puis vient l'affrontement final. Plutarque raconte que son origine est l'attaque de légionnaires construisant un camp pour la nuit, comme l'armée romaine avait l'habitude de pratiquer :
« Crassus s'en alla camper auprès de l'ennemi, et se mit à creuser une tranchée. Les esclaves s'élancèrent sur les travailleurs et les attaquèrent. Puis, des renforts arrivant successivement des deux côtés, Spartacus se vit dans la nécessité de mettre en bataille toute son armée… » Plutarque, vie de Crassus.
Ces esclaves firent preuve d'un grand courage, aux dires des historiens antiques qui pourtant n'étaient pas indulgents avec eux :
« …dénué de toute espérance, il en vint aux mains avec Crassus, fort de la nombreuse armée qu'il avait encore. Le combat fut long et acharné tant il y avait au combat de milliers d'hommes désespérés. » Appien, livre I guerre contre Spartacus.
Seulement 6.000 d'entre eux furent faits prisonniers, ils furent crucifiés le long des 195 Kms de la via Appia. On estime le nombre des victimes, dans l'armée vaincue à 60.000 tandis que les Romains ne firent état que de 1.000 morts. Le corps de Spartacus ne fut jamais retrouvé.
Pompée qui arrivait d'Espagne ne se heurta qu'à des troupes débordées qui avaient réussi à s'extirper de la bataille principale.
Pour toute récompense, Crassus n'eut droit qu'à une « ovatio » et non à un triomphe. On ne tire pas gloire d'avoir battu des révoltés :
« On supporterait peut-être encore la honte d'une guerre contre des esclaves. S'ils sont, par leur condition, exposés à toutes les servitudes, ils n'en sont pas moins comme une seconde espèce d'hommes, et nous les associons aux avantages de notre liberté. Mais quel nom donner à la guerre provoquée par Spartacus ? Je ne sais ; car des esclaves y servirent, des gladiateurs y commandèrent. Les premiers étaient de la plus basse condition, les seconds de la pire des conditions, et de tels adversaires accrurent les malheurs de Rome par la honte dont ils les couvrirent. » Florus, livre III, 21.